Réinventer la restauration : les stratégies pour un marché en mutation
29 Avril 2024Constamment en mutation, le secteur de la restauration doit sans cesse se renouveler pour perdurer. Durant sa conférence, Bernard Boutboul, Président de Gira Conseil, a longuement parlé de ce marché aussi porteur que résilient. La restauration était euphorique, déjà en 2018 et 2019 (9% de croissance), mais également en 2022 (+13% vs 2019 ).
Pour 2023, même si les chiffres ne sont pas encore consolidés, on s’oriente vers 8% de hausse par rapport à 2022 ; malgré un décrochage en novembre de la conso des ménages.
Zoom sur un secteur et sur les stratégies à adopter pour rester attractif.
Un secteur sensible aux évènements mais résilient
Le secteur la restauration est un secteur sensible aux évènements. Cette idée n’est pas nouvelle mais il a fallu attendre la crise sanitaire de 2020 pour le remarquer.
Les restaurateurs doivent sans cesse se réinventer pour s’adapter aux différentes crises, aux tendances et nouvelles générations. C’est un secteur résilient qui, comme nous l’avons vu en 2022 et 2023, se remet de ses crises lorsque les acteurs se réinventent. La reprise post covid a été euphorique, avec trois indicateurs en hausse en même temps : le panier moyen, la fréquenation et le temps passé.
Durant sa conférence, Bernard Boutboul nous a livré son regard et ses conseils pour tirer son épingle du jeu en restauration.
Un modèle de restaurant à repenser
La restauration doit s’adapter et muter pour survivre. En premier lieu, les restaurants doivent s’adapter aux demandes et aux envies, notamment des nouvelles générations. Bernard Boutboul se veut rassurant : en 30 ans, le constat est positif puisqu’après chaque crise, le secteur de la restauration est reparti à la hausse. Mais le modèle est sans cesse à repenser pour ne pas aller dans le mur. Le modèle économique n’est plus le même. Depuis 8 ou 9 ans, les restaurateurs sortent d’écoles de commerce, ils ont une vision affûtée du modèle qu’ils souhaitent et ne laissent rien au hasard pour être performant.
Trois leviers à travailler en restauration
Selon Bernard Boutboul, trois leviers sont à travailler pour améliorer son chiffre et rester compétitif :
- Le Foodcost : en 2024, il s’agit d’acheter autrement, le plus possible en local. Le consommateur souhaite une carte réduite avec une rotation plus régulière. La formule entrée/plat/fromage dessert avec un vaste choix n’est plus attractive. Aujourd’hui, une carte réduite envoie un signal positif et un message clair : la carte est soignée avec des produits en circuit court.
- Les frais de personnel : la question de la pénurie de personnel est au centre des débats. Mais elle date en réalité de plus de 20 ans. Une nouvelle idée émerge : embaucher des profils « commerçants » en salle pour booster les ventes.
Ne pas oublier qu’aujourd’hui, le pouvoir est du côté des employés qui choisissent les employeurs, le temps de travail, etc. Une autre idée émerge pour attirer le personnel en restauration : la cooptation rémunérée : si un employé transmet une candidature qui conduit à une embauche, il reçoit une prime. - Le coût d’occupation : si autrefois l’emplacement était la priorité absolue, ce n’est plus le cas. Les restaurateurs d’aujourd’hui sortent des écoles de commerce avec une idée en tête : « qu’importe l’emplacement, si nous sommes attractifs, les consommateurs se déplaceront jusqu’à nous ». Cela permet de réduire considérablement le coût d’occupation. Plus besoin de louer ou d’investir des locaux en hyper centre avec un prix au mètre carré nettement plus élevé.
En optimisant ces trois leviers, vous avez toutes les cartes en main pour des restaurants performants.
Les moins 35 ans : une nouvelle cible pour les restaurants
Les moins de 35 ans sont les consommateurs les plus fidèles. Attention, ils restent exigeants et viennent pour vivre une expérience. Pour cela, il est important de combiner trois facteurs :
- Lieu et atmosphère pour attiser la curiosité des clients, mais aussi pour qu’ils reviennent. C’est aussi un facteur important pour le bouche-à-oreille. Un client surpris en parlera autour de lui ;
- L’assiette : pas seulement le contenu, mais aussi le contenant. L’assiette en elle-même et le dressage. Favoriser la surprise et l’admiration pour encourager les clients à prendre en photo et à poster, notamment sur Instagram ;
- Le personnel : en restauration plus que dans tout autre commerce, les échanges avec le personnel sont cruciaux : il n’y a non pas 2 étapes de contacts, mais 10. Le client doit se sentir considéré et accueilli de manière personnalisée, pour avoir envie de revenir.
La « double vie alimentaire » des consommateurs, ou les écarts entre discours et réalité
Il est important de souligner l’écart entre ce que les consommateurs déclarent dans les sondages et la réalité. Selon les sondages, c’est le « sans » qui l’emporte. La priorité des Français serait de consommer sans lactose, sans gluten, sans sucre, etc.
Pourtant, la France co-détient le record mondial de consommation de pizzas, et le volume de vente des burgers a été multiplié par 14 ces dernières années.
Quelle conclusion en tirer ? Les Français font attention à ce qu’ils mangent chez eux, mais en hors-domicile, place à la gourmandise et au plaisir.
La révolution alimentaire silencieuse est en marche
Bernard Boutboul met en garde : il faudrait probablement arrêter d’analyser les moyennes pour se concentrer sur les dispersions. En 2022, 8 restaurants sur 10 qui ont ouvert étaient de la restauration rapide. On note une forte hausse de la cuisine du monde pour vivre une expérience et découvrir des saveurs.
Attention, la révolution est en marche, dans les deux à trois prochaines années, nous perdrons 20% du parc : les restaurants les moins aptes aux changements risquent de disparaître.
En règle générale, les indépendants se portent bien, ce sont plutôt les chaînes qui sont en mauvaise posture et qui doivent, pour résister, innover.